Congrès des maires : quand les territoires affrontent seuls le naufrage de l’État

Au Congrès des maires 2025, élus épuisés, exécutif absent et polémiques inutiles révèlent un pays gouverné à distance. Territoires en première ligne, État en retrait : la démocratie locale se délite sous nos yeux.

Congrès des maires : quand les territoires affrontent seuls le naufrage de l’État
Credit : Fréquence Populaire

Aujourd’hui, 20 novembre 2025, le Congrès des maires s’est conclu par un discours du Premier ministre Sébastien Lecornu, qui a voulu montrer que l’État était à l’écoute des territoires. Pourtant, cette édition du congrès a donné une impression opposée : un pouvoir absent, un exécutif fatigué et déconnecté du pays, et une démocratie qui fonctionne désormais comme un système minoritaire où la plupart des décisions ne correspondent plus à la réalité du terrain.

Le Congrès des maires n’est généralement ni un lieu de polémique ni un terrain de confrontation institutionnelle. Il sert plutôt de baromètre. Cette année, il a mis en lumière un profond malaise politique : une France dirigée sans vision, sans planification et sans direction. Les élus locaux attendent une orientation politique claire, pas des discours. Ils ne l’ont pas eu.

Dans les stands, les allées et les réunions, le constat était le même : les maires sont fatigués, parfois épuisés, souvent en colère. Ils ont l’impression d’être devenus les gestionnaires par défaut d’un pays qui ne prévoit plus rien, n’anticipe plus rien et délègue toujours plus sans jamais soutenir. Les communes sont en première ligne, mais l’État n’est plus présent. Le Président, absent et silencieux pendant le congrès, semble avoir renoncé à affronter la réalité du pays.

Cette édition aura aussi été marquée par une polémique militaire venue parasiter les travaux et masquer les urgences du quotidien municipal — un écran de fumée involontaire ou opportun, qui a déformé l’image du congrès dans l’espace médiatique. Pourtant, derrière cette brèche, les problèmes sont très concrets : gouvernance locale devenue ingérable, normes incohérentes, services publics en épuisement, élus qui n’y croient plus.

Derrière ces tensions politiques, il y a surtout une réalité rarement évoquée : la crise démocratique qui traverse notre pays se manifeste d’abord dans la sociologie de celles et ceux qui tiennent encore les communes à bout de bras.

Une crise démocratique profonde (dont le vieillissement des élus n’est qu’un symptôme)

D’après les discours officiels, la France manquerait simplement de renouvellement au sein de ses élus locaux. Pourtant, le Congrès des maires montre une réalité différente : il s’agit d’une crise démocratique profonde, où la représentation locale s’effrite en même temps que la confiance collective. Les communes peinent à trouver des candidats, non pas parce que le métier est mal connu, mais parce qu’il n’a plus les moyens d’exister. Être maire, autrefois un honneur, est devenu un fardeau administratif, juridique et politique.

Il est vrai que les élus vieillissent, mais ce phénomène témoigne surtout d’une perte d’attrait pour la démocratie. Les jeunes ne s’engagent plus, non par égoïsme ni par manque d’intérêt, mais parce que le poste de maire n’apporte plus de pouvoir, de liberté d’action ou de reconnaissance. C’est le signe d’une démocratie qui ne suscite plus de vocations, car elle ne fait plus naître d’espoir.

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L’âge des maires, quarante ans de vieillissement silencieux

Si on regarde l’évolution depuis les années 1980, on voit très clairement que la fonction de maire vieillit plus vite que le pays. Au début des années 1980, l’âge moyen des maires était d’environ 53 ans (53,3 ans en 1983). Dans les années 1990, on passe autour de 55 ans (chiffre donné pour 1995). Au tournant des années 2000, les données disponibles indiquent environ 50 ans en 2001 puis 56–57 ans à la fin de la décennie, avec 56 ans et 10 mois mesurés après les municipales de 2008. 

En 2014, on reste sur un âge moyen d’environ 56 ans, avant un nouveau saut au cycle suivant : 58,9 ans après les municipales de 2020. Les enquêtes récentes (AMF, CEVIPOF, travaux de Martial Foucault) situent aujourd’hui l’âge moyen autour de 59–60 ans en 2025. 

Autrement dit, en quarante ans, on est passé de maires d’un peu plus de cinquante ans à des maires qui ont en moyenne près de soixante ans. Le renouvellement générationnel ne se fait plus : ce n’est pas seulement une question d’âge, c’est le signe d’une démocratie locale qui ne produit plus de nouvelles vocations.

La crise démocratique se voit aussi dans la composition du personnel politique local. Les communes manquent toujours de femmes dans les postes à responsabilité et la diversité sociale diminue. Les électeurs remarquent que leurs élus ne reflètent plus vraiment leurs territoires. Ce décalage alimente un autre problème : la méfiance.

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